« L’ART DE LA GUERRE »
par Manlio Dinucci
Les États-Unis, qui avaient suspendus leurs manœuvres militaires sur le continent européen du fait de l’épidémie de Covid-19, viennent de les reprendre. Aucun des objectifs initiaux n’a été supprimé. Il s’agit toujours d’orienter la politique étrangère de l’Union européenne contre la Russie.
RÉSEAU VOLTAIRE | ROME (ITALIE) | 27 MAI 2020
L’US Army Europe (Armée de Terre US en Europe), « après une attentive évaluation et planification », a décidé qu’elle effectuera en Pologne, du 5 au 19 juin, l’exercice Allied Spririt dans le cadre de la grande manœuvre Defender-Europe 20 (Défenseur de l’Europe 2020).
Y participeront 4 000 soldats états-uniens d’unités blindées et d’infanterie, avec 2 000 soldats polonais à leurs côtés. L’exercice, qui aurait dû se dérouler en mai, a été renvoyé car, à cause du Covid-19, la Defender-Europe 20 a été partiellement modifiée. Mais, précise l’US Army Europe, quand en mars a été suspendu l’envoi de forces depuis les États-Unis, « plus de 90 % des équipements destinés à la Defender-Europe 20 étaient déjà à bord d’avions et navires se dirigeant vers l’Europe ». Au total sont arrivés plus de 3 000 pièces d’équipement, en commençant par des chars d’assaut, auxquels se sont ajoutés plus de 9 000 véhicules blindés et autres véhicules provenant des dépôts « pré-positionnés » que l’Armée de Terre US maintient en Allemagne.
Des États-Unis sont arrivés plus de 6 000 soldats, intégrés à d’autres milliers basés en Europe. Malgré « l’ajustement dû au Covid-19 », communique l’US Army, « de nombreux objectifs de rapidité stratégique ont été réalisés ». Il annonce ainsi que, pour rattraper le temps perdu, « l’US Army Europe est en train de planifier des exercices supplémentaires dans les prochains mois, basés sur de nombreux objectifs originaux de la Defender-Europe 20 visant à accroître la rapidité et l’inter-opérabilité des forces US et alliées ».
L’Allied Spirit est ainsi la première d’une série d’exercices dans le même cadre stratégique clairement anti-Russie. Ce n’est pas par hasard qu’il se déroule en Pologne. C’est là —selon ce qui a été stipulé dans la Déclaration signée par le président Trump avec le président polonais Duda en septembre dernier— que les États-Unis sont en train de fortement augmenter leur présence militaire. Le nombre de soldats qui y sont maintenus en permanence, avec un système de rotation, se trouve augmenté de 4 500 à 5 500.
À Poznan l’US Army installe son propre quartier-général de division sur base avancée. À Drawsko Pomorskie les forces armées US ouvrent un Centre d’entraînement au combat. À Wrocław-Strachowice l’US Air Force réalise une grande escale aéroportuaire de débarquement. À Lask l’US Air Force déploie un escadron d’avions sans pilote, y compris drones Reaper. À Powidz, une brigade aérienne de combat.
À Powidz comme à Lubliniec, les Forces US pour les opérations spéciales constituent leurs propres bases. Dans une localité qui reste à définir, sera déployée en permanence l’escadre de combat d’une brigade blindée US. Tout l’équipement est déjà stocké à Bergen-Hohne en Allemagne.
L’US Army Europe communique en outre que la 173ème Brigade aéroportée, basée à Vicence, est en train de planifier des opérations dans les Balkans et dans la région de la mer Noire, tandis que le 10ème Commandement de défense aérienne et de missiles participera à des exercices dans la Baltique.
L’US Air Force communique que les trois types de bombardiers stratégiques états-uniens à double capacité conventionnelle et nucléaire —B-2 Spirit, B-1B Lancer et B-52H— ont accompli en mai, en partant des États-Unis, des missions en Europe. Ceci a démontré que « la pandémie du Covid-19 n’a pas compromis la rapidité et la portée des bombardiers stratégiques US ».
Ces faits, ignorés par les grands médias qui avaient annoncé en mars l’effacement de la Defender-Europe 20 à cause du Covid-19, confirment que les USA n’ont pas effacé mais seulement remodelé l’opération stratégique, en la prolongeant. L’objectif de Washington reste celui d’accroître la tension avec la Russie en utilisant l’Europe comme première ligne de la confrontation. Cela permet au États-Unis de renforcer leur leadership sur les alliés européens et d’orienter la politique étrangère et militaire de l’Union européenne, dans laquelle 22 des 27 membres appartiennent à l’Otan sous commandement US.
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